• Talhèrs de dessenh en classa

    Talhèrs de dessenh en classa

    Entà recuélher las representacions de l'occitan deus eslhèves eths/eras-medish.as, organizèi talhèrs de dessenh en classa. Collectèi atau 98 dessenhs dens 6 classas dens 5 escòlas (2 calandretas de Navèra-Aquitània e 3 escòlas bilinguas en Tarn-e-Garona).

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    Genèse du projet

    En mars 2021, peu après mon arrivée à l'OPLO, j'ai participé au 18e Congrès International des Langues Minoritaires (en ligne) où j'ai présenté l'ESL 2020 en anglais. Pendant ces 3 jours, j'ai pu assister à de nombreuses présentations passionnantes et découvrir des projets de recherche visant la documentation, préservation et revitalisation de langues minoritaires à travers le monde.

    Une présentation d'une chercheuse basque espagnole, Paula Kasares, a particulièrement attiré mon attention et m'a permis de reconsidérer certaines prémisses de ma recherche. En effet, dans sa communication, intitulée "Children, recipients and agents: multiagency and multidirectionality in Basque language socialization", Kasares a expliqué que la transmission était toujours étudiée en tant que "transfert linguistique des parents aux enfants", ce qui ne prend donc pas les enfants comme acteurs de la revitalisation linguistique sans prendre en compte la part active qu'ils jouent dans le processus, et cela signifie également que seule les familles dans lesquelles les parents sont locuteurs sont généralement étudiées. De plus, elle remarquai que la compétence linguistique est considérée comme statique, en ce que l'on ne prend pas en compte les évolutions dans leur compétence que la situation de transmission peut amener. L'étude qualitative approfondie que la chercheuse basque a menée auprès de familles navarraises a montré que les enfants sont plus que des récepteurs passifs dans le phénomène de transmission qui est multidirectionnel. Par exemple, si un enfant apprend le basque à l'école, il est possible que le fait de chanter en basque à la maison, ou de faire les devoirs, réactive les compétences de la mamie vivant avec la famille, ce qui permettra au basque d'être à nouveau parlé dans le foyer. Pour des parents non basquophones, la scolarité en basque de leurs enfants peut aussi constituer un premier contact avec la langue et susciter l'envie d'apprendre la langue pour accompagner les apprentissage de leurs enfants.

    Dans le cadre de ma thèse, qui a pour visée l'augmentation des effectifs en cursus occitans, il m'est donc paru intéressant de ne pas focaliser mon étude uniquement sur les motivations des parents, mais aussi sur ce qu'en pensent et en retirent les apprentant.es elles/eux-mêmes et comment s'articule leur apprentissage à l'école et la pratique de l'occitan dans leur vie en général.

     

    Choix de la méthode

    Hormis les corpus liées au projet Liceans Ambaissadors, qui sont en quelque sortes des corpus d'opportunité car ils émanent des projets développés par l'OPLO pendant ma CIFRE, mon projet de recherche est surtout centré sur l'école primaire (maternelle et élémentaire), et donc sur des apprenant.es de 3 à 11 ans. Impossible, donc, de leur demander de participer à mon enquête par questionnaire, d'autant plus du fait de l'utilisation de la méthode MAC et de sa contrainte déjà difficilement applicable par des répondant.es adultes. De même, il semblait difficile d'envisager d'inclure un public aussi jeune à ma phase d'entretiens semi-dirigés.

    C'est alors que mon directeur de recherche m'a proposé de passer par une méthode d'élicitation utilisant le dessin : des ateliers de dessin en classe, méthode qu'il avait déjà utilisée lui-même dans le contexte des deux îlots francoprovençaux des Pouilles en Italie. Une méthode similaire a également déjà été utilisée par Grégoire Andréo-Reynaud en contexte de calandretas. Une telle méthode parait très à propos dans un projet de recherche tel que le mien, étant donné que je travaille sur les représentations sociales de la langue, et que le dessin est utilisé ici comme un moyen de représenter directement les idées des répondant.es.

     

    Test du protocole de collecte

    Séance d'essai

    Ayant la chance d'avoir une calandreta à proximité immédiate du campus de mon université, qui organisait prochainement, qui plus est, une semaine occitane dans le cadre de laquelle mon directeur de recherche organisait une demi-journée de table ronde scientifique, j'ai décidé d'aller tester mon idée d'atelier à la calandreta de la Dauna à Pessac (33) en février 2023.

    J'ai ainsi été accueillie dans la classe des CE1-CE2-CM1-CM2 pour une après-midi, qui s'est déroulée intégralement en occitan. Je leur ai présenté mon projet de thèse - en expliquant que les étudiant.es de doctorat doivent écrire un livre d'au moins 300 pages et que mon sujet est l'occitan. L'idée était de leur donner une position d'informateur/trice et non d'objet de l'étude. Je leur ai donc demandé leur aide car ils/elles utilisent l'occitan au quotidien et ont donc sans doute des connaissances sur le sujet à m'apporter. La consigne de l'atelier a ensuite été donnée : "L'occitan, per vosautes, qu'es aquò ? Dessenhatz l'occitan."

    Dans une logique d'échange, je leur ai promis de leur montrer mon propre dessin à la fin de l'atelier. Cela visait d'une part à renforcer leur statut d'informateur/trice, de personne sachante apportant un savoir utile au projet, au même titre que moi, en leur montrant qu'ils/elles n'étaient pas les seul.es à faire des efforts. D'autre part, cela visait à les décomplexer vis-à-vis de la qualité de leurs dessins, ayant assuré que mon dessin n'était pas "beau" - chose qu'ils/elles ont pu voir par elles/eux-mêmes :

    Talhèrs de dessenh en classa

     

     

    L'enseignante et sa stagiaire se sont d'ailleurs également prêtées au jeu.

     

    Retours sur l'atelier test

    Ce test m'a permis de constater plusieurs points sur lesquels j'ai pu réfléchir à des améliorations :

    * la question, qui se veut la plus vaste et vague possible pour ne pas influencer les réponses/dessins, a mis les enfants en difficulté et ils/elles ont mis un peu de temps à démarrer l'atelier et ont posé beaucoup de questions.

         -> piste d'amélioration : demander plutôt "ça vous fait penser à quoi le mot occitan ?"

    *certains dessins étaient assez cryptiques et peuvent difficilement faire l'objet d'analyse : ex : dessin assez abstrait, dessin d'un personnage de manga, etc.

         -> piste d'amélioration : discuter avec les enfants pendant ou après la réalisation du dessin pour savoir ce qu'ils/elles représentent

    * aspect technique : les dessins au crayon passent mal au scanner

         -> piste d'amélioration : encourager l'utilisation de feutres

    * la difficulté de la tâche mène l'enseignante à répondre aux questions des élèves, mais chaque mot ou exemple prononcé devant toute la classe est susceptible d'influencer ce qu'ils/elles décident de représenter.

         -> piste d'amélioration : éviter au maximum de donner des exemples devant tout le monde et prendre en note les échanges qui ont lieu en classe pendant l'atelier.

    * l'aide de l'enseignante m'a été précieuse afin de bien faire comprendre la consigne, car elle était capable de la reformuler, de la transposer dans un langage qui est familier aux élèves, voire d'encourager les élèves à réfléchir à l'atelier.

         -> cela m'a conforté dans l'idée que malgré la distance, il était important que je vienne en classe pour animer l'atelier - plutôt que de demander à distance à des enseignant.es de le faire et de m'envoyer les dessins, par exemple. Dans les ateliers suivants, les enseignantes ont d'ailleurs été très précieuses également lors de la discussion de classe qui a suivi les ateliers, car elles connaissent leurs élèves et savent comment obtenir le meilleur d'elles/eux en termes de participation et de réflexion.

    * observation annexe : la croix occitane est très difficile à dessiner, surtout sans modèle, et cela mobilise beaucoup de temps dans l'atelier...

     

    Groupe "de contrôle"

    Lors de discussions informelles en préparant l'atelier a été émise l'hypothèse, voir le constat, que les ateliers de dessin fonctionnent bien avec les enfants, alors que les adultes se projettent généralement moins dans ce genre de méthodologie et comprennent moins ce qu'on leur demande, ou comment dessiner. J'ai donc eu envie de tester mon protocole de collecte sur un public plus âgé, à savoir, des étudiant.es.

    Pour ce faire, j'ai ainsi mis en place un "atelier en libre service" au local des assocations SciLaB (sciences du langage) et Bord'Òc (occitan) de l'université Bordeaux Montaigne, que je fréquente régulièrement en qualité de trésorière de Bord'Òc :

    Talhèrs de dessenh en classa   Talhèrs de dessenh en classa

    Les prémisses à la base de ce choix était que :

    * je savais, de par le questionnaire de pré-enquête de mon protocole MAC, que les étudiant.es de sciences du langage ne connaissaient généralement rien à l'occitan :

    Talhèrs de dessenh en classa

    * je savais également que mon directeur de recherche, Giovanni Agresti, leur parle de la situation de l'occitan dans plusieurs de ses cours ;

    * je savais, de plus, quels types de contacts avec l'occitan ils/elles sont amené.es à avoir en fréquentant le local : la langue n'y est généralement pas parlée, si ce n'est pour dire "adishatz" ou "au còp que ven", mais les membres de l'association Bord'Òc y sont connu.es et identifié.es, et l'association a fait un gros travail de mise en valeur visuelle de la langue via des affiches, notamment pour mettre en avant des mots français issus de l'occitan ;

    -> Cela me permettait ainsi d'avoir une relative idée de l'origine et de la nature des représentations de cette population, et ainsi de surtout vérifier leur capacité à les retranscrire via le medium du dessin.

    En comparaison avec les dessins des élèves de la calandreta, qui ont pourtant été plus accompagné.es, et à qui la consigne a pu être expliquée et reformulée plus en détails, les étudiant.es ne semblent pas avoir éprouvé de difficultés à représenter l'occitan, en représentant majoritairement des éléments issus, comme je l'avais prédit, de leurs deux sources principales d'information sur la langue : cartes géographiques (cours de sociolinguistique) et mots entendus/vus dans le local (requinqué, cresperas...) :

    Talhèrs de dessenh en classa

    En comparaison, voici le dessin d'un.e adhérent.e de l'association Bord'Òc :

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    Description du corpus final

    Dessins enfants

    > Calandreta de la Dauna (Pessac, 33) : 15 dessins (du CE1 au CM2)

    > classes bilingue à l'école du Sarlac (Moissac, 82) : 14 dessins de CM1 et 13 dessins de CM2

    > classe bilingue à l'école Fernand Bales (Montauban, 82) : 24 dessins (du CE2 au CM2)

    > classe bilingue Gérard Lalanne (Valence d'Agen, 82) : 15 dessins (CM1-CM2)

    > Calandreta Bel Solelh (Bergerac, 24) : 17 dessins (du CE1 au CM2)

    + notes d'observation de chaque atelier

    + notes de la discussion de classe menée après chaque atelier

    + entretien avec chaque enseignante

    Dessins adultes

    > atelier en libre service à l'université Bordeaux Montaigne : 12 dessins

    > enseignante, stagiaires : 5 dessins

     

     


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